Une maison d’édition Claude Fosse, 22 avril 2020 Dans cette période où la plupart d’entre nous est confiné chez soi, travailler pour une Maison d’édition rappelle qu’il existe des Maisons bien plus importantes, bien plus diversifiées que celles qui nous abritent individuellement ou en famille. Elles ont tout à la fois le sens du singulier et du collectif. J’ai, en tête, ce texte de Jean-Luc Lagarce écrit pour une présentation de saison et dans lequel il disait que nous devions en prendre soin. Certaines ne s’appellent pas « maison » et pourtant, on s’y attarde, on y revient, on y prend ses habitudes. Qu’elles soient librairies ou bibliothèques, qu’elles accueillent du spectacle vivant ou des expositions, les richesses qu’elles contiennent valent bien plus que tout l’or du monde. Elles sont nos Maisons à tous, celles qui nous subliment et nous réunissent. La première maison de la culture, en 1935, avait comme siège « l’Association des écrivains et artistes révolutionnaires. ». Écrivains et artistes réunis dans des lieux de vie, de connaissances, de créations, de questionnements, de partages. Ce sont les fondements de notre maison. Une maison de livres, de culture, en constante révolution. Révolution, c’est ainsi qu’on désigne le temps nécessaire à une futaie pour se renouveler. C’est là que notre maison d’édition prend tout son sens : nous avons opté pour une futaie diversifiée et jardinée. Elle a le charme d’un bois aux essences multiples et n’épuise pas les sols. Les arbres qui la composent sont d’âges différents. Ainsi, un nombre raisonnable arrive régulièrement à maturation et le sous-bois est toujours riche en humus. Les quatre saisons y sont multicolores. Nous ne pourrions nous passer d’elle pour accueillir ce qui donnera naissance à un livre. Chaque texte est apporté précieusement par son auteur. Nous ne faisons ni bouturage, ni greffe, ni tout autre procédé de multiplication. Les plants, uniques, arrivent régulièrement, porteurs d’histoires, jeunes pousses encore fragiles ou déjà en pleine maturation. Nous privilégions ceux qui auront leur place dans la futaie et qui pourront y affirmer leur personnalité. Durant tout ce temps, nous cheminons avec leurs créateurs. Aux moments des récoltes, nous nous tournons vers ces belles Maisons, celles qui nous rassemblent et nous enchantent. Elles sont les écrins de chaque livre, chaque texte, chaque parole. Nous leur parlons alors de sciences, d’art, de jardins, d’idées, d’imagination, de réflexions ... tous ces petits signes noirs déposés sur des pages blanches, toutes ces histoires, ces partages de connaissance, fruits de leurs auteurs et de notre futaie. Vivement que toutes nos Maisons communes ouvrent leurs portes et nous accueillent à nouveau, nous leur apporterons des fleurs de nos jardins !