Le domaine de la Giscle a une histoire, et c’est celle aussi de votre famille ? Pierre Audemard : Oui, mes ancêtres étaient présents il y a plusieurs siècles et à l’époque le domaine faisait du blé, irriguant les cultures grâce à un moulin à eau sur la rivière de la Giscle, qui existait déjà du temps des Templiers. Il y avait une forge, une écurie et plus tard une machine à vapeur qui permettait de faire tourner le moulin quand il n’y avait pas d’eau. La vigne est apparue à l’époque de mon arrière-grand-père. On a longtemps travaillé à l’ancienne, avec des courtiers, puis en vente directe à la cave. Lorsque j’ai rencontré ma femme, au milieu des années 80, on a commencé à vendre le vin en bouteille. Ça a tout de suite marché. Et depuis les années 2000, on vend chaque année tout notre stock en direct ou à la cave. Vous avez sûrement un bon commercial ? P. A. : Aucun ! Je ne vous cache pas qu’au début, on allait avec ma femme offrir des vins de rosés au bord des plages, dans les marchés. On s’est fait connaitre, et le bouche à oreille a fonctionné. On avait 15 hectares, on en a aujourd’hui 45. Tout allait bien… jusqu’au 16 août de l’année dernière ? P. A. : Oui, ce jour-là, l’incendie est arrivé, on a fait ce qu’on a pu pour sauver le maximum de choses, mais hélas on a perdu le caveau, les chais, presque 2,5 millions de dégâts. Mais dès le lendemain, la solidarité s’est mise en place (ému). Dix jours après, on avait tout le matériel opérationnel pour faire les vendanges et rentrer les raisins. On nous a prêtés, loués du matériel, parfois des gens que je ne connaissais pas, des collègues vignerons. Et cette récolte post incendie ? P. A. : Elle a été normale, on a retrouvé la qualité. Mais on s’est retrouvé avec du stock de vins, sachant qu’on n’allait pas pouvoir rouvrir la cave de vente avant le printemps. Mais là aussi la solidarité a joué et les courtiers nous ont vendu le vin. On a pu libérer les cuves, mettre notre chaine d’embouteillage et sortir nos premières bouteilles en avril. On est opérationnel cet été, uniquement en rosé bien sûr, puisque nous n’avons plus de barriques pour les rouges. Quelles sont les perspectives aujourd’hui ? P. A. : On a travaillé la terre et la forêt pour se protéger des pluies. On a refait un hangar et en ce mois de juin, on lance les travaux de la cave, qui sera à l’identique… mais en mieux ! Elle aura le même aspect mais a été conçue pour être adaptée aux normes modernes. Tout sera plus pratique et sécurisé… notamment si un incendie revient. La Giscle reste un domaine familial ? P. A. : Oui, on est huit à travailler sur le domaine. Mes filles ont intégré l’entreprise en juillet de l’année dernière : elles assurent la continuité familiale. C’est fantastique, car elles sont à fond dans leur boulot, motivées et pleines d’initiatives. Ce sont elles par exemple qui ont imaginé cette cuvée Phénix, l’oiseau qui renait de ses cendres, comme un symbole pour montrer la renaissance de la Giscle !