Le samedi matin, c’est le marché aux veaux à Langogne. C’est pratiquement le dernier de France. Tous les samedis à 10h30, le coup de sifflet permet aux maquignons de rentrer et de découvrir les veaux amenés par les éleveurs. Chaque éleveur tient son veau, les maquignons font leurs offres. Ils les font encore en anciens francs, en centaines d’anciens francs, ils ont gardé cette habitude. Quand ils disent 20 et demi, cela veut dire 2050 francs et ces 2050 francs, il faut les traduire en euros. Il n’y a pas beaucoup de veaux, une vingtaine et souvent trente ou quarante personnes qui regardent. À la fin du mois de mars, c’est la fête des bœufs. Des génisses sont vendues à 24 mois. Historiquement, pendant le carême, toute la période de Pâques, les gens ne mangeaient pas de viande. Le jour de Pâques, c’était vraiment l’explosion de nourriture. Le boucher achetait les animaux les plus beaux, les exposait devant la boucherie pour avoir la meilleure devanture. Je l’ai encore vu quand j’étais très jeune, ça n’existe plus, par contre il reste l’idée de ce concours qui permet de choisir les animaux et de les faire figurer dans les vitrines. 200 à 250 génisses sont présentées par une trentaine ou une quarantaine d’éleveurs. À la Révolution française, il a été décidé qu’il n’y aurait pas de propriété sans propriétaire. Tout bien devait avoir un propriétaire identifié. Ici, cela voulait dire qu’il fallait partager les sectionaux, c’est-à-dire précipiter la disparition de ceux qui n’avaient rien. Il y a alors eu des mouvements extrêmement forts et tous ont refusé de partager les sectionaux. C’était l’intérêt des pauvres et celui des propriétaires qui avaient ainsi une main-d’œuvre disponible. Il faut retenir que les sectionaux ont permis de garder, sur nos territoires, nombre de familles.» Francis Chabalier